Maupassant, Fort comme la Mort, étude

Publié le par asoftmadness

=> cf. article de Y.Leclerc pour le Dictionnaire des oeuvres littéraires françaises ( le recevoir. Il présente, résume l'oeuvre et propose une critique de manière tout à fait pertinente)

I. Autour de l'oeuvre: 

   Fort comme la Mort, roman de Guy de Maupassant (1850-1893), est publié à Paris en feuilleton dans la Revue illustrée du 1er février au 15 mai 1889, avant de l'être en volume chez Ollendorff la même année. il s'agit du cinquième roman de l'auteur et pour l'occasion, ce dernier change de genre et de milieu: il prend cette fois pour cadre l'aristocratie des salons parisiens et donne au tout, les caractères d'un récit de moeurs et d'analyse. Le sujet, énnoncé dans le texte lui-même, se réduit à "l'amour éperdu d'un vieil homme pour une jeune fille". Le vieux peintre Olivier Bertin cherche à voir clair en lui-même. A sa mère, Maupassant disait vouloir créer dans ce roman "une vision de la vie terible, tendre et désespérée". Le titre, emprunté au Cantique des cantiques, ne remplit ce programme qu'à la faveur d'une inflexion du sens initial: l'amour qui dans la Bible résiste à la mort, devient ici, à l'inverse, "quelque chose d'irrésistible, de destructeur, de plus fort que la mort"...

II. En 'vrac':

Pour le critique Jules Lemaître, "la thèse du roman, c'est l'immense douleur de vieillir, simplement"

Fort comme la Mort  est tout d'abord un roman sentimental, et ses valeurs sentimentales tournent autour de deux oeuvres picturales.

-la place de l'art et de l'artiste dans Fort comme la Mort:

=> cf. Maupassant "critique d'art", articles sur les peintres du 7 juillet 1885 et du 2 mai 1886 ( le recevoir )

   Dans Fort comme la Mort, l'art prend une connotation religieuse et se substitue même presque à la religion: on a la même attitude au musée qu'à l'église à savoir, on chuchote, on se recueuille... Mais l'art est également un objet de commerce. On trouve ce caractère avec la Halle des Beaux-arts. L'art est à la fois un culte et un marché.

Olivier Bertin est une sorte d'exception dans le sens où habituellement une distance est mise entre les artistes et les mondains. De manière générale, onnote une incompatibilité et une absence de mélange mais avec Bertin et les Guilleroys la situation diffère. Il y a un détournement de fonction si l'on peut dire: l'artiste offre un autre rapport au monde, on se l'approprie et on le met chez soi. Relativement à cette pseudo barrière entre artistes et non artistes, on pourrait dire que c'est la rencontre des deux catégories qui en serait à l'origine. Les peintres (ou autres gens de la même fibre artistique) sont générallement des êtres solitaires et il n'est pas de leur devoir d'expliquer aux non-initiés leurs oeuvres. Le texte de Fort comme la Mort  traduit la malaise ou plus encore, l'aspect tortureux et pour le moins désagréable de ce genre de confrontation: le regard de l'artiste nous donne à voir la scène telle qu'il la perçcoit avec des expressions comme "bouillie de monde qui grouillait et bruissait". les assonances et alitérations participent de cette traduction d'émotions. Comment pour l'artiste, le peintre ici, rendre compte du visuel et de l'affectif par le langage? On a là une différence majeure entre le peintre -pour n'en rester qu'à lui- et l'écrivain. L'écrivain, de par son travail des mots, est relativement davantage inséré dans la société, une société où tout passe pa le langage. Le vocabulaire n'est pas toujours adapté à la peinture, posant ainsi souvent le peintre ou l'artiste dans une position un tant soit peu marginale.

-le désenchantement du monde:

   Maupassant semble là reprendre une idée de Schopenhauer (philosophe allemand du début du XIXème siècle). Ce dernier a en effet largement influencé les artistes et écrivains français. Il pose que s'abstraire du monde est une bonne chose, que le monde est décevant. Le culte de Schopenhauer apparait comme l'affirmation de ne plus être piégé par les faux prestiges du monde. Cette 'mode' aboutit à l'idée que le monde est un lieu où l'on s'ennuie. Olivier Bertin en fait les frais: on s'ennuie chez les mondains. Plus concrètement et dans un rapport direct au roman de Maupassant, le peintre ne trouve plus de sujets. C'est là le signe tangible d'une décrépitude, et il est fort probable que Maupassant de même, ait connu cette crainte du tarissement. Le monde -là, parisien- tel qu'il se présente alors nous apparait comme une nature artifielle. Le parc Monceau est un parc totalement artificiel à force d'être modifié par l'homme. Bertin sait que le mondene présente pas de surprise et conntamine Anette de sa vision désenchantée:" tu n'auras plus besoin de penser.." lui dit-il. Pour lui, toutes les opinions se valent; le monde est un lieu décevant et la pensée qui essaie de nous en faire sortir est corrosive. La seule façon de s'échaper reste peut-être le rêve.

-le pouvoir du rêve:

   Le rêve semble en effet avoir un poids non négligeable dans le roman. C'est par lui que Bertin tombe dans un état d'hallucination durable: le portrait descendu de sa toile (c'est à dire, Annette, copie de sa mère telle qu'elle était au moment où elle fut jadis imortalisée sur la toile, Annette donc, faisant son apparition dans le monde parisien) insature la rêverie du peintre. La puissance du rêve est qui plus est évoquée quand l'auteur nous parle de la musqiue come d'un vecteur conduisant à l'halluciation. Le passage par le rêve conduit à une sorte d'illumination, à la vérité. Nous sommes là dans une perspective contraire à  celle de Platon pour qui la seule vérité était celle des idées et que toutes les choses auxquelles nous accédons par les sens sont illusoires.

Selon Maupassant, on accederait à l'essence des êtres par une exploration de la mémoire, une méoire qu'il apparente à une sorte de vase dans laquelle il nous faut plonger pour retrouver la vérité. C'est ce à quoi semble devoir se livrer Olivier Bertin: un mouvement de retour en arrière, de retour sur-soi pour interroger sa conscience. La peinture apparait comme un accès à cette vérité supperlative. On a en l'exemple avec le portrait d'Any qui remet en présence un état de la mère qui était aboli. Il faut alors voir la peinture comme un moment magique. C'est grâce également au portrait que comme on l'a vu, la ressemblance et la confusion entre Any et Annette peut se faire.

[ paradoxe notable à étudier puisque certains posent la peinture en tant que langage ne renvoyant qu'à elle-même et établissant un rapport direct au réel , sans prétexte d'évasion.]

 

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